Le 19 mai 1870, éclate le Grand Feu, qui devait détruire en quelques heures villages et forêts sur un parcours de 30 lieues. Laissons la parole à un témoin, Charles Bérubé :
« Je suis entré dans une maison en face de la croix où quatre hommes ont brûlé, pour chercher mon fils Pitre, qui avait trois ans. À la première accalmie, je sors. José Martin et son garçon étaient dans une maison neuve; Narcisse Morin et son garçon étaient avec eux. Je disais à José : « Persistes-tu à sauver ta maison? » « Si ma maison brûle, je brûlerai avec. » Ils se sont réfugiés dans une cave contiguë où nous avions mis nos effets.
« Le lendemain nous ne les avions pas revus. Job et Abraham Bilodeau, après avoir en vain cherché, supposent qu’ils ont pris le bois. Je leur dis qu’ils ne peuvent être dans la cave. J’y entre. Narcisse avait la face intacte. Tout le reste était calciné. On mit tout ce qu’il restait des quatre dans quatre chaudières ordinaires. (Ceci se passait où demeure actuellement M. Stanislas Bolduc).
« Wilfrid Lavoie s’est fait brûler en voulant sauver son cheval. On l’a trouvé dans la porte tout noir. Il ne restait que le tronc ». (Ceci se passait où demeure actuellement M. Sylvio Gagnon).
La chapelle a péri dans le feu ainsi que la plupart des maisons. Parmi celles qui ont survécu, on compte celles de Messieurs Denis Boily, Antoine Boudreault, Sabin Gagnon, A. Charlton (encore habitée).
Le Grand Feu a beau être régional, il reste la tragédie de Chambord. Notre paroisse en a souffert plus que toutes les autres, elle y a laissé cinq victimes et combien de maisons et de biens. C’est pour rendre hommage à ces victimes qu’a été érigé en 1947 un magnifique calvaire à l’endroit où elles ont péri. Ce monument est tout à l’honneur de Chambord. Grâce au dévouement d’un bon nombre de paroissiens, la mémoire de ces victimes est assurée d’une longue survie. La postérité y trouvera même un coffret où sont renfermées quelques pièces de bois calciné de la vieille cave qui a été le tombeau de nos quatre victimes.